No light, no light in your bright blue eyes
Paralysée.
Elle avait la sensation d’être aussi effrayée qu’une enfant à l’aube de sa majorité ; comme réalisant que ses prochaines décisions auraient des conséquences sur son futur. La bouteille, là, il était encore temps d’y renoncer. De faire demi-tour. De rentrer dans les rangs et de ne plus souffrir de ses propres pensées ; parce que c’était précisément là qu’était le problème. Sa volonté à haïr le système en place et à vouloir fuir était de l’or liquide qu’elle ingérait volontairement.
Un poison qui, peu à peu, commençait à la tuer. Et si elle devenait un bon soldat ? Et s’il y avait une clé pour enfermer le rêve de ces jours qu’elle était lasse d’attendre ? Mais c’était renoncer. Mais c’était avouer avoir fauté depuis le début en laissant à son cœur le droit d’espérer. Mais était-elle réellement prête à abandonner ? À tout perdre au nom d’une cause en laquelle elle n’osait pas croire, tant elle était utopique – à rejeter tout ce qu’elle avait abandonné pour son idéal. Ave ramenait ses genoux contre ses seins, les prunelles brûlées par quelques larmes qu’elle tâchait de retenir pour ne pas déstabiliser ses camarades de chambre. L’heure du couvre-feu approchait.
C’était précisément ce qu’elle voulait. Ce qu’elle redoutait. Y aller ? Rester ? Lèvres pincées, l’Outsider se redressa sur son lit en lorgnant les lumières qui s’éteignaient progressivement. Par ses relations – et ses aventures qui perdaient leur saveur au fil des heures – la jeune femme avait eu vent de l’organisation des tours de garde et comment les esquiver ; un avantage qu’elle devait à ses courbes généreuses. Abandonnant son plumard, emmitouflée dans un sweat large et un pantalon de yoga, Ave se coulait hors de la chambre. D’un pas lent et mesuré, elle guidait ses deux camarades en slalomant ; dépassant les pièces qu’elle connaissait sur le bout des doigts. Peu à peu, avalant les volées de marches avec leur trophée et les raisons qui les poussaient à se rassembler pour succomber au vice sans se les raconter mutuellement, le groupe déboula au laboratoire où la voie était libre.
Elle déambula entre les tables et les bureaux, pour se caler à même le sol gelé. Son dos rencontra le canapé râpeux et ses doigts s’imprégnèrent de l’odeur caractéristique qui enveloppait les endroits comme celui-là : celle des génies, celle du froid et de la javel utilisée pour cacher les fabuleux ratés que ces murs avaient dû abriter plus d’une fois.
ㄧ Levons un verre ou deux !Pour tout ce qu'on a perdu.I never knew daylight could be so violent
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