Ma vie était tranquille à Londres, jusqu'à ce que mes parents décident d'aller habiter en Amérique, ce fut un choix qui engendra bien des problèmes. 
Pour commencer, mes parents se disputaient beaucoup le soir et je leur en voulais beaucoup, à cause de ça, je ne dormais plus la nuit, j'entendais les cris, les injures et les insultes qui résonnaient dans la cuisine, j'écoutais à la porte de ma chambre. La situation était de pire en pire, l'ambiance à la maison était froide, c'était une période vraiment difficile pour moi. Ma petite soeur ne se doutait de rien et j'était bien contente pour elle.
Un soir, mon père avait préparé ses valises, avait embrassé ma sœur, mon frère et moi puis avait pris la porte, j'avais couru dehors mais c'était trop tard, j'avais encore vu la voiture quitter le quartier éclairé par les reverbères. J'avais fondu en larmes, ma mère m'avait parlé de leur séparation mais allez expliquer ça à une gamine de 5 ans qui ne voulait rien entendre. Il m'a fallut du temps pour comprendre qu'il ne reviendrait plus. Je n'en voulais à personne, je ne pouvais forcer mes parents à s'aimer.
A l'école, je n'étais pas brillante du tout. Je n'avais pas beaucoup d'amis, sauf Andrew. C'était un garçon aux cheveux châtains, aux yeux d'un bleu pastel et d'un visage à la peau lisse, sans imperfections. Il avait un corps élancé, de longues jambes et était toujours là pour moi. Nous passions tous nos après-midi ensemble.
Le temps passa rapidement, sans qu'il y ait vraiment d'événements importants dans ma vie. Après l'école obligatoire, j'avais trouvé un petit travail dans une chaîne de magasins américains. De mon temps libre, j'allais courir pour me détendre ou je faisais du baby-sitting pour me faire un peu d'argent. Ma vie n'était pas trépidante et en plus de ça, je ne voyais presque plus Andrew.

1er Mars 2021 :
Nous sommes les trois, sur le seuil de la porte, à se remémorer  tous les bons moments que nous avons passés dans cette maison. Une larme coule sur ma joue.  Nous partirons en train, il faut rejoindre la gare de la ville à pied, nous allons dans ce bunker dont nous avait parlé mon oncle. C'est pour moi un déchirement, ces vapeurs chimiques auront bientôt  tout détruit, le seul moyen d'éviter notre disparition est de s'enfuir dans un endroit plus sûr. Le quai est bondé et le train arrive dans un grand vacarme. Je sens que les gens sont pressés et stressés, l'atmosphère est palpable. Le train devient vite rempli à cause des nombreux arrêts qu'il effectue. 
On nous annonce un terminus. Nous sortons les trois sans nous lâcher, je vois une personne s'effondrer  à côté de moi, elle respire très mal. J'attrape la main de ma mère, de ma sœur et je me mets à courir, le temps presse. Je suis les panneaux d'indication pour que nous puissions rejoindre Twenty-One. Je cours de toutes mes forces. Nous arrivons vers un portail où des centaines de personnes y sont agglutinées, sûrement ont-elles le même but que nous. Nous tentons de nous frayer un passage parmi ces gens. Ma sœur me lâche la main et je la perds de vue, je crie son nom et ma mère remarque que nous l'avons perdue, je vois que ses yeux deviennent vides. Nous y sommes presque. Tout ce passe trop vite, le bruit d'une explosion me siffle dans les oreilles et me donne mal à la tête. Toutes les personnes se sauvent en courant, des cris retentissent, des pleurs et je me retourne pour voir où se trouve ma soeur. Des corps sont éparpillés et gisent dans une mare de sang. Je scrute les visages et vois celui de ma soeur, je m'accroupis vers elle, je ne sens plus son pouls. Je m'écroule littéralement sur elle tout en pleurant comme une sauvage. Ma mère, livide, me tire vers elle, nous devons continuer. J'aperçois la famille d'Andrew et lui-même, eux  aussi gisants avec les autres corps, tous les souvenirs remontent à la surface. J'entends un coup de feu et des cris. C'est trop dangereux de rester là, il faut que nous abandonnions nos proches. Je cours, main dans la main avec ma mère, la poitrine en feu et les yeux brûlants. Plus rien ne compte, je cours de toutes mes forces, j'ai l'impression que ce qu'il m'arrive est fictif, comme si ces événements ne devaient pas m'arriver à moi. Un autre coup de feu me fait revenir à la réalité. Nous sommes des centaines à courir là, en essayant de sauver notre peau. Je ne sais pas qui a tiré, était-ce un malade mental souhaitant notre mort ? Je ne savais pas. Des gens s'écroulent, épuisés par le poids du chagrin et sûrement les vapeurs qui ont dû affecter leur corps. Ma mère s'essouffle, elle dit avoir un mal de chien à la poitrine, je la tire vers moi, nous ne devons pas tarder. "Continue sans moi" me lâche-t-elle, épuisée. J'aperçois des hommes armés courant vers moi. Je fonds en larmes et prends la fuite en laissant ma mère mourir seule, ma décision est lâche, je le sais mais je suis tellement horrifiée que je ne sais plus ce que je fais. Je pique un sprint malgré ma fatigue et le groupe de personnes qui courent avec moi arrivons à semer les personnes armées. Une question me ravage, qui était ces personnes qui voulaient notre mort ?
Des terroristes ? Des fous ? La réponse reste encore aujourd'hui un mystère.
Nous sommes à peine vingt personnes qui réussissent à rejoindre cette ville. Je n'y crois pas, j'ai réussi à arriver au bunker mais je ne sais plus qui je suis, je n'ai plus de repaire ici, je ne connais personne. 
Nous arrivons devant l'immense porte du bunker, un léger sourire aux lèvres malgré ce qu'il vient de nous arriver.

Les cheveux bruns, presque noirs, m'arrivant jusqu'à la poitrine, les yeux gris, profonds et clairs ainsi qu'un corps maigre, voilà ce qu'on remarque sur moi au premier coup d’œil. J'ai toujours été une bête au sport, je battais tout le monde, même les garçons, mes camarades étaient jaloux de moi sauf Andrew, qui était le seul à m'encourager. Lors d'une course organisée par l'école, j'étais arrivée deuxième après un garçon qui faisait à peu près deux fois ma taille, j'avais été encore plus détestée par les autres. J'étais comme une maladie que les autres ne voulaient pas attraper, alors ils ne s'approchaient pas de moi.
Je mesure 1m64 et je pèse 53 kilos, les médecins me répètent sans cesse que je suis trop maigre, c'est vrai mais je n'ai presque plus faim depuis que je suis dans cet enfer, et puis soyons francs, peut-être que d'autres personnes ont plus besoin de manger que moi dans ce fichu bunker.
Je n'ai pas beaucoup de musculature mais j'essaie d'entretenir mon corps, je suis outsider et je dois m'entraîner, étant donné que j'ai de longues jambes, j'arrive à courir assez vite et ma spécialité c'est l'endurance mais depuis ce terrible événement, je n'ai pas repris beaucoup de forces. Et si vous voulez savoir je chausse du 39, c'est une information futile je sais mais au moins, vous le savez. On m'a toujours dit que j'étais une fille qui avait du tempérament, je n'ai jamais vraiment su ce que cela voulait signifier mais de toute manière, j'ai tout perdu depuis l'accident, même ma propre identité, je ne sais pas qui je suis vraiment. 
 

Je ne sais pas si j'arriverais à me décrire sans dire de bêtises. Je suis quelqu'un de juste, qui n'aime pas les embrouilles, je ne cherche pas la popularité, ni l'argent. Si tu me côtoies souvent, tu pourras remarquer que je suis impatiente et je suis très indécise, je ne réfléchis pas tout le temps et fait les choses beaucoup trop vite, ce qui peut causer certains problèmes. Je n'ai jamais eu confiance en moi, je marchai dans les traces de ma mère avant et maintenant j'ai dû me résoudre à me débrouiller seule, ce qui est très difficile. 
J'ai facilement honte et je me sens coupable, j'ai, dans certains cas, de l'empathie pour certaines personnes. 
J'avais neuf ans seulement, une de mes camarades venait d'aller chercher son repas à la cantine et s'était fait un croche-pied, la pauvre avait de la purée sur tout le visage, je m'étais alors avancée vers elle pour l'aider, elle m'avait repoussée en grimaçant "Je n'ai pas besoin de quelqu'un comme toi pour m'aider" s'était-elle exclamée avant que j'aille me réfugier aux toilettes pour déverser des larmes.
Je dois aussi vous parler d'une chose qui me terrifie énormément ; les miroirs. Cela me glace le sang, j'essaie d'oublier ma famille, j'essaie d'oublier leurs morts affligeantes qui m'ont fait souffrir énormément. Il y a à peine quelques jours, je me suis retrouvée devant un miroir et j'ai  vu le reflet de ma mère, je lui ressemble beaucoup, cette vision m'a poignardée, c'était comme un poids qui s'abattait sur moi. Son reflet m'a ramené à moi ; ma famille n'est plus et je ne peux plus rien faire.
Le mieux si tu veux connaitre mon caractère, c'est de passer du temps avec moi, car je crois que je ne suis pas la personne la mieux placée pour me décrire.